Au beau milieu de la grande bataille que se livrent Battlefield et Call of Duty, les nouveaux FPS militaires ont souvent du mal à exister. Pour arriver à se détacher, il faut apporter quelque chose de remarquable, une plus-value qui puisse attirer le joueur friand de combats militaires. Certains jouent donc brillamment la carte du réalisme exacerbé (ArmA en tête), tandis que d'autres, comme Warface, ont tout simplement décidé de reprendre la recette immuable du FPS grand public et de ne lui enlever qu'une seule chose : son prix.
Vous n'êtes pas sans savoir que le modèle économique à la mode, en dehors du financement participatif, c'est le "Free to play". Pour ceux qui auraient du mal avec ce genre d'expression anglophone, je vous suggère dans un premier temps de retourner à l'école et je vous dirai ensuite qu'il s'agit d'un jeu proposé pour environ zéro euro. Contrepartie inévitable, c'est grâce à la boutique intégrée au jeu que les développeurs de chez Crytek vont financer leur développement continu. Les plus perspicaces d'entre vous auront d'ailleurs remarqué que le studio à l'origine de ce Warface n'en est pas à son coup d'essai, puisqu'il s'agit principalement des auteurs de Far Cry et Crysis. Oui, on a connu pire en matière de CV. Warface ne vient pas non plus d'apparaitre soudainement sur les radars : en effet, nous avions déjà eu l'occasion de le prendre en main en début d'année et nous en avions trouvé l'essai concluant. Maintenant qu'il est officiellement disponible en version finale, il est temps de voir si les développeurs de Crytek ont bien tenu le cap ces derniers mois.
World War Web
La première chose qui frappe le vieux briscard habitué des installations PC, c'est qu'ici tout s'effectue par l'intermédiaire du navigateur Internet et de l'interface "Gface", le petit réseau social maison. On se connecte sur le site officiel et ensuite, tout est transparent pour l'utilisateur. J'avoue que c'est un peu déroutant, car le jeu s'exécute directement au sein du navigateur. Oui, normalement moi aussi ça m'aurait fait fuir, mais là il faut avouer que ce système atypique fonctionne bien et que c'est assez bluffant. Pas d'inquiétude, le plein écran est également disponible, tout comme les réglages de la résolution ou la V-Sync, au même titre que sur n'importe quel autre jeu PC.
Choisissez votre camp
Le titre est d'abord scindé en deux grandes sections : missions en coopération ou affrontements entre joueurs. La première partie est tout à fait plaisante et les missions sont étonnamment bien rythmées. Évidemment, vous ne serez pas surpris d'apprendre que les objectifs sont d'une originalité outrancière, puisqu'il faudra généralement aller jusqu'au point d'extraction en tuant tous les ennemis présents (avouez que c'est osé). On affronte ainsi des soldats qui tentent de vous barrer la route à grand renfort de scripts et même si leur I.A est loin d'être irréprochable, elle ne vient jamais gâcher la fête. Mais ne nous leurrons pas, ce mode de jeu permet surtout de débloquer des classes de personnages et des armes, histoire de ne pas débarquer en slip quand on aura décidé d'aller jouer dans la cour des grands.
Des mécaniques bien huilées
La deuxième section du jeu permet donc d'entrer dans l'arène du multijoueur compétitif. Là, les développeurs de Crytek ont appliqué à la lettre le manuel du parfait "Call-of-duty-like". Rien ne manque à l'appel : on trouve du deatchmatch, des poses de bombes, de la capture de zones ou encore des attaques de base. Point remarquable : les parties s'enclenchent rapidement et je n'ai pas noté d'errances dans l'enchainement des matchs ni dans la gestion des lobby. Maintenant, parlons un peu du gameplay. Là encore, pas de surprises révolutionnaires. La façon d'appréhender le jeu dépend évidemment de la classe de personnage choisi, avec les sempiternels soldats, infirmiers, snipers et ingénieurs qui ont chacun leurs caractéristiques bien ancrées depuis la nuit des temps. Au cœur des combats, le gameplay se révèle vif et dynamique, avec la possibilité de rusher et de partir en glissade tout en tirant. Cela donne une petite touche "John Woo" du plus bel effet. Petit bémol : il semblerait que l'équilibrage entre les armes et certaines classes ne soit pas encore totalement au point, même si ça c'est visiblement arrangé depuis nos dernières impressions en février dernier. En fonction de l'implication des autres joueurs, le gameplay oscillera entre le très bourrin et le bourrin-tactique, avec des possibilités d'approche parfois plus posées selon les maps. Ceci dit ne rêvez pas, les sensations de jeu seront toujours beaucoup plus proches d'un Black Ops que d'un Raven Shield. La coopération au cœur des équipes est également souvent suggérée, avec la possibilité de s'entraider pour grimper à certains endroits stratégiques, ou pour fournir un appui à ses coéquipiers, au même titre que dans un Team Fortress 2. On a donc droit à tout ce qui caractérise un FPS classique orienté multijoueur, avec un ensemble de mécaniques solides et éprouvées, où tous les rouages s'imbriquent ici de manière efficiente.
Un moteur tout terrain
En ce qui concerne le rendu graphique, le moteur déroule une qualité visuelle réellement probante (c'est estampillé Cry Engine 3), mais ça ne deviendra pas pour autant la nouvelle démo technique à garder sous le coude pour impressionner le petit voisin. C'est propre et maîtrisé mais loin d'être aussi bluffant qu'un Battlefield 3 ou 4, même avec tous les réglages à fond. Mais pour un titre lancé à partir d'un navigateur, il faut reconnaitre que Crytek a su placer le curseur au bon endroit pour trouver un certain équilibre entre rendu graphique satisfaisant et fluidité de tous les instants. Grâce à cet arbitrage, le titre peut tourner sans anicroche sur des configs de tous horizons, qu'elles soient puissantes ou relativement modestes. Les textures sont propres, les jeux de lumière convaincants mais l'ensemble reste finalement assez sobre car au service du ping avant tout.
La boutique aux cadeaux
Autre détail appréciable : la boutique en ligne est tout sauf intrusive. Le jeu ne vous force pas la main sur les achats in-game et j'ai même fini par oublier leur existence. En définitive, ces achats permettent surtout d'accélérer la customisation du perso et on pourra se faire plaisir avec un gilet pare-balles flambant neuf ou de nouvelles armes rutilantes. À ce jour, ce système ne semble pas trop favoriser les joueurs assujettis à l'ISF au détriment des bénéficiaires du RSA, ce qui est fort bienvenu.
Inutile d'attendre une promo...
Au global, le bilan est donc très positif. Le plaisir est bien là, immédiat, avec une courbe de progression classique mais qui fonctionne bien. On a toujours envie de partir à la chasse aux points d'XP, de débloquer de nouvelles classes ou de nouvelles armes, ou tout simplement de se défouler un peu. Ceci étant, il ne faut pas non plus attendre monts et merveilles de Warface et vous ne trouverez aucun bouleversement des codes établis par les FPS multi depuis des générations. Hormis quelques détails sympathiques, tout est classique et globalement ultra-conventionnel. Cet aspect-là est d'ailleurs un poil décevant, car quelque part, j'espérais un peu plus de la part de Crytek. Mais il faut raison garder : à ce prix-là, il serait déplacé de faire la fine bouche.